1939-1945 Comme vous ne l’ignorer pas c’est une période d’occupation allemande en Alsace.
Les cloches du village ont été réquisitionnées par la grande armé du Reich pour faire des canons et des munitions en novembre 1942 et pour ne jamais revenir.
Le carillon n’était plus qu’un ding dong sourd !
Il ne restait que la petite Sainte Rémi du nom du saint patron de l’église pour le service de l’angélus et comme signal de rassemblement ou de danger pour les habitants de la commune.
(La deuxième cloche : 630kg, tonalité "FAdiéze", dédié à St Rémi)
Cette dernière très ancienne nous vient de l’église romane de la Feldkirch qui datais du temps où Clovis avait été baptisé par Saint Rémi (voir tableau du baptême du roi Clovis placé derrière le maître-autel de l’église). C’est ici que le dénommé « WADIL » s’est établie et l’avait fait construire en contre-bas de la colline du « Frietig » au bord de l’ancienne voie romaine.
Pour preuve les restes les fondations d’un Vicus Romain Routier sur cette hauteur qui surplombe la plaine lorsque la voie romaine longeait encore les collines sous-Vosgiennes. C’est la dernière attestation visible de la présence de l’empire romain à proximité du village de Wettolsheim.
Mon père, ma mère, et moi (15ans) nous étions en train de tailler la vigne dit « Le Ronsabari ». Le lieu-dit Ronsabari est le versant Nord-Est d’une colline qui avec le versant Sud-Ouest de la colline d’en face, fait le vallon du « Brunnwaïbachla », nom du petit ruisseau qui y coule et qui descend de la proche forêt et de la montagne, les premières pentes des Vosges.
S’Brunnwaïbachla est quelquefois à sec en été mais cela seulement par endroit, car tout au long du chemin il est approvisionné par des mini-sources telles « s’Hanïanecklabrénala » et « s’Sandbrénala » et plus bas par le trop-plein d’une grande source. La source qui alimente les deux fontaines du village : « dr’Ewerbruna » et « dr’Unterbruna » qui jusqu’à nos jours ont gardé au village leur droit de cité.
- - Un dicton dit de leur eaux « Quiconque en boira ne quittera plus le pays » .
Dans les vignes de la colline d’en face, tous les vignerons rentrèrent ; il n’était que 15 heures, on a entendu le carillon du proche clocher il n’y a qu’un moment. Que se passait-il donc ? Sur ça, on entend un coup de sifflet strident.
- « Ehm, ça , c’est « Emili », je connais son coup de sifflet » (disait papa).
Emili, savait ainsi siffler en mettant quatre doits dans sa bouche, l’index et le médius de chaque main, et un coup inégalable en partait.
- « Va voir ce qu’il veux ».
Je courus vers le bas, mon sécateur toujours ouvert dans la main, et arrivé au fond du chemin creux, il y avait bien Emili notre voisin !
- « Il faut rentrer vite demain matin, le village va être fouillé par la Gestapo ».
Et il rentre en claquant de ses sabots en faisant un salut militaire, qui résonnèrent fort dans le chemin creux du vallon.
Je cours vers mes parents qui, intriguées, se sont déjà rapprochés pour voir.
- Bon, allons, rentrons disait mon père.
- Mais toi, va dire cette nouvelle au père de Jules que j’ai vu passer ; il est sûrement au « Sand » sinon va au « Schwitzersand ».
- Tu lui diras que c’est ton père qui t’envoie ….
Le bruit courait que demain-matin, le village serait encerclé de soldats.
- Ainsi faisait les prussiens lors d’une fouille en règle lors de la guerre de 1870, dont quelques anciens avaient souvenirs.
La fouille qu’allait faire la Gestapo …. Cela pourrait aller loin car nombreux étaient les « Déserteurs »
- Des malgré-nous appelés de force, venus en permission et non-repartis-au-front.
Ces derniers vivaient en cachette dans le village ou encore dans des cabanons. Des cabanons étaient construits par les familles dans des anciennes carrières, ou dissimulés dans un pli d’un vallon de la proche montagne, dans le but de s’y réfugier en cas de besoin.
Ainsi donc, la nuit venue, c’étaient des hommes qui partaient vers la montagne et aussi beaucoup de bêtes. Des cochons enfermés dans des cages improvisées, des vaches, des veaux, des génisses attachées derrière des tombereaux que tiraient des bœufs, ou encore de vieux chevaux (des inaptes au service armé, non réquisitionnés). Toute la nuit durant ça circulait : tombereaux attelés, des hommes, des femmes, des enfants portant valises, cabas, gibecières, filets, paquets, ou tirant des remorques de vélos, aux roues quelquefois dégonflés (vu le manque de pneumatique) ou encore des « Mark-kutscha » (véhicule léger à 4 roues dans lequel on transportait autrefois les marchandises à vendre au marché : œufs, poules, lapins, …. Et on rentrait avec ses emplettes faites avec l’argent de la vente et que l’on poussait devant soi).
C’étais un exode vers la forêt, la montagne protectrice.
Nous, ainsi que nos proches voisins, avions caché le ou les cochons « de trop » dans la cave d’une salle de société proche. Les poules de trop dans la fosse au jus du pressoir, les lapins, dans un fût vide hors-service. Deux sacs de blé montés avec beaucoup de peine sur la grange et enfouis profondément sous la paille.
Le matin venait, trouvant un village des plus paisibles, tout le monde attendait la venue de ces choses annoncées, propagées grâce à la solidarité des villageois.
Or, vers 8h30 – 9h, quatre « verts » (policier allemand avec, sur leur tête, des képis verts en forme de pots de chambre à l’envers) arrivent.
Une chance c’est la « Feldpolizei » (police rurale) et non la « Gestapo » (Nazi)….
Deux par deux, ils commencèrent leur boulot. Deux pour le haut, deux pour le bas du village et, tel le facteur dans sa tournée, ils suivent les numéros des maisons et toutes furent visitées. Chez ils nous ils arrivent vers trois heures, leurs registres sous les bras à compléter les pages préimprimées pour faciliter leurs comptage, rigueur allemande exige, et visitent : l’écurie, l’étable, la porcherie et au passage, comptent les poules et les lapins « restés » au clapier, puis repartent, pour continuer leur besogne.
Mais il y avait quelques incidents tout de même. Dans le bas du village, « les verts » demandèrent un verre d’eau à la maîtresse de maison « s’Loni »). Elle monta donc leur chercher l’eau à la cuisine, mais pour lui éviter de redescendre, « les verts » la suivent. Or, le fils de la maison « der Franzi », un peu trop téméraire, qui n’était pas allé comme tous les autres se réfugier en forêt, faillit leur tomber dans les mains ; mais à la toute dernière seconde il se cacha derrière la porte de la cuisine ; « les verts » heureusement, étaient restés dans le couloir pour boire leur eau. Ah ! Il l’a échappé belle, ce malgré-nous en permission « prolongée ».
Mon copain « Toni »me racontait que chez eux, c’était plutôt le drame. Sa maman « Rési », fort contente que tout, ce soit si bien passé et en authentique vigneronne, offrit à boire de leur vin. Elle chercha une bonne bouteille et les servit là, à l’ombre de l’auvent du bâtiment du pressoir.
- « Donnerwetter-welche-ein-guter-Tropfen » et ils burent à la santé des vignerons et de la grande armée, et cette bouteille subit son sort et fut vidée en cette fin d’après-midi laborieuse.
Mais voilà que du dessous de leurs pieds montait un fanfaron cocoricoooo ! Car ils étaient à même sur les madriers qui recouvraient la fosse « s’Mostloch » (fosse qui reçoit le jus lors des vendanges) qui se trouvait là. La dame faillit s’évanouir ….
Et Rési se dit :
- Voilà ce qui arrive, si on tire le diable par la queue, songea-t-elle.
Nos gendarmes, eux, vidèrent leurs verres sans broncher et remercièrent madame de son hospitalité et s’en allèrent, leur registre sous leurs bras, en disant, pour essayer de rassurer la dame.
- « Soyez sans crainte, on n’a rien entendu du tout »
Mais cela n’alla pas sans représailles pour cet impertinent coq : il devait payer son indiscrétion de sa vie.
Car le jour suivant, dimanche matin, nos deux « verts », cette fois non déguisés, mais en civil, sont revenus de la proche ville en vélo voir s’ils ne pourraient acheter pour chacun une ou deux bouteilles de cet excellent vin, ou encore, sait-on jamais une toute petite tranche de lard de campagne, ou un lapin, ou peut être un coq.
Henri Albert Strubel (mon père)
Il faut savoir que le village est la résidence du général de la poche de Colmar (Maison FREYBURGER), et de ce fait était peut-être un peu épargné ou moins surveillé pour bénéficier de la bienveillance de la population.
(wikipedia : Le groupe d’armé « Oberrhien » sous la direction du « Reichsführer Heinrich Himmler »)
La « Feldpolizei » était en fraction sur la place du village. Mon père portait toujours le fameux berret savoyard interdit, par insouciance de la jeunesse ou par esprit Rebel contre l’occupant. Descendant la rue pour chercher du sel chez l’épicier (Spezerei Strubel) qui venait à manquer en cette fin de semaine, vendredi jour de cuisson du pain. Par chance sa tante « s’Léonie » l’entrevoie de sa cuisine et cours lui enlever son couvre-chef, « tu le reprends en montant »…
Un autre jour visite inopiné de la « Feldpolizei », Jules le promis de l’aîné en permission-longue était déjà à la « Stube », et voilà que la grand-mère Frietig lui propose un Schnaps en l’honneur de la grande armée du Reich. Refus impossible et le voilà installé. Sous la table Jules, et notre ami de la « Feldpolizei » qui courtisait « la Finala » (Josephine). Il fit semblant de ne rien remarqué et but son Schnaps d’un trait avant de prendre congé.
- Marguerite raconte avoir cousu un drapeau américain au-dessus de chambre du dit général quelques temps avant la libération. La fourniture de tissus était très contrôlé, surtout le rouge et le bleu, un stratagème était nécessaire comme la réalisation sur commande du général d’une nappe pour son épouse.
- Le général Rommel de passage leurs avait donné des montres bracelets, impossible à trouver.
- Un autre jour le Feldlieutnant également en cantonnement dans cette grande maison qui était un hôtel-restaurant avant guerre, propose de céder sa chambre à une famille qui avait quitté le fond de vallée pour accouché à l’hopital de la ville proche et venait se réfugier chez les cousins.
- « Der Adrien » disait l’autre jour que leur cours servait de garage d’entretiens des véhicules en cantonnement. Donc plusieurs soldats était présent à longueur de journée, et vivait avec la famille, repas, vins, schnaps, etc …..
Or dans l’écurie ses parents avaient caché un jeune réfugié Juif « Elias » qui attendait le moment de partir avec un passeur. Il avait son âge, l’œil vif et enjôleur, et juste assez grand pour voir sur la table pour chopper un morceau à manger. Personne ne faisait attention, il était là et c’est tout.
Personne non plus s’étonnait de voir une traction rutilante bâchée et sans roues dans la grange (les roues étaient cachés sous la paille en cas de besoin…. Les pneumatiques étaient normalement réquisitionnés pour les besoins de la guerre).
- Il y avait aussi « dr Oncle Chari » de son état Pompe-Funèbre,. Il avait une camionnette aménagé pour son activité. Un laisser-passer lui permettait d’aller et venir presque librement sur tout le département de Sélestat à Saint-Louis. Certains dissent que lors de ces transports il n’était pas rare que la place du mort était occupé par un militaire des forces allié, souvent un aviateur tombé sur zone lors d’une mission. Ce dernier était caché dans la famille en attendant un transfert vers la Suisse.
D’autres partaient par les sentiers des Vosges avec un guide local. Le garde-chasse était armé d’un vieux fusil et sa présence n’éveillait pas de soupçons. Il avait un laisser passer pour tout le massif environnant.
- Un avion était tombé tout près, vers le « Husserenweg ». Le pilote n’as jamais été retrouvé par la police militaires allemandes.
D’après les dire du préfet de Colmar à son secrétaire, Wettolsheim est un village modèle tout va d’après « Wunsch » (traduction possible par « à merveille »).
Il n’est pas dit que c’est le nom de famille du secrétaire de mairie de l’époque et que son frère était le secrétaire du Préfet.
- Un fait est que le secrétaire de mairie de l’époque fut averti par téléphone par un collègue travaillant à la préfecture, que le village serait fouillé par les allemands. « Face à l’envahisseur, quel bel exemple de solidarité entre les villageois ».
- De toute la durée de la guerre, aucune dénonciation dans le village, tout le monde est resté solidaire contre l’occupant.
Epilogue : On dira que c’est la Sainte Vierge Marie de la grotte de Lourdes (copie de la grotte de Masiabelle en grandeur nature) qui protège le village. Construite sur la commande expresse de Msg SCHOEPFER évêque de Lourdes et de Tarbes sur l’emplacement de sa maison natale en 1912.
Voir sinon le Chanoine SIG de la Cathédrale de Strasbourg qui avait une bonne influence sur le village.
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